My Sen bijoux - pour aller plus loin

Pour conclure cette interview, Alix nous en apprend davantage sur ses goûts. Elle évoque également les difficultés de ce métier : se démarquer, ne pas se sous-estimer, être polyvalent, etc.

Photo : © Tony Trichanh

Pouvez-vous citer 3 créateurs de bijoux que vous aimez?

Je citerai Sophie Hanagarth, professeure aux Arts Décoratifs de Strasbourg, qui a un travail fort et assez brut que j’aime beaucoup. Il y a également d’anciens élèves comme Marine Dominiczak (lauréate du Prix de la Jeune Création Métiers d’art 2016), Annie Sibert ou Marion Delarue qui accumule un savoir-faire impressionnant, acquis dans plusieurs pays d’Asie.

Photo : © Tony Trichanh

Avez-vous des artistes de référence ?

Ca a toujours été une question difficile pour moi… il y a énormément d’artistes que j’admire, dans tous les domaines, mais je ne saurais pas en extraire quelques uns, comme référence.
Cela dit, pour le bijou, je dirais Peter Hoogeboom, Henri Gargat, David Bielander…

Photo : © Tony Trichanh

Avez-vous des bijoux fétiches? Quelle est leur histoire?

Pas de bijoux fétiches… j’ai porté beaucoup de bijoux, j’ai une boîte qui en est remplie ! Mais depuis que je suis rentrée dans l’atelier, je n’en porte plus ! Seulement mon alliance et ma bague de fiançailles, tout ça est d’un classique…

Photo : © Tony Trichanh

Quelles sont les 2 principales qualités d’un bon créateur ?

Se remettre en question (mais sans se dévaloriser) pour toujours avancer. La patience et la curiosité sont également importantes…

Photo : © Tony Trichanh

Que conseilleriez-vous à un créateur novice?

Je viens de commencer, je me vois mal donner mon opinion comme un vieux sage. Mais j’ai pu constater qu’il faut être patient, car tout prend du temps !
Il vaut mieux ne pas attendre que tout soit parfait pour se lancer car, encore une fois, tout prend du temps. On construit les choses peu à peu, en ratant et en apprenant.
C’est un plus de reconnaître sa valeur ou la valeur de son travail. Toutefois, c’est aussi quelque chose qui évolue et qu’on doit travailler.

Photo : © My Sen. Pièce réalisée en école.

Y a-t-il un bijou que vous auriez voulu créer à la place d’un autre créateur?

Plein… J’éprouve souvent ce sentiment ! A chaque fois que je vois un bijou que je trouve « efficace » en fait.
On peut admirer le style de quelqu’un, vouloir faire la même chose, mais au final, c’est presque comme si on ne choisissait pas ce qui sort de nous.
J’ai parfois l’impression de créer « malgré moi ».

Par exemple, je me suis souvent dit que je n’avais pas un style établi, et je suis toujours à sa recherche. Mais mes proches me disent « bien sûr que tu as un style reconnaissable » ! C’est difficile d’avoir du recul sur ce que l’on fait. Et je suis consciente d’être plus clairvoyante sur ce que font les autres.
C’est un peu frustrant, parce que je ne suis pas satisfaite à 100 % de ce que je fais mais je pense que c’est aussi ce qui me fait avancer. L’herbe est plus verte chez le voisin.

Photo : © Tony Trichanh

Être créateur aujourd’hui, en quoi est-ce un défi?

Aujourd’hui ou avant… ce qui peut paraître difficile (et attirant en même temps !), c’est le fait d’être seul, de devoir tout gérer soi-même en ayant plusieurs casquettes dont certaines qu’on laisserait bien de côté.

Avec Internet et les boutiques en lignes, on peut avoir tendance à penser que c’est facile de se lancer. Et ça l’est ! Mais ensuite, il faut arriver à trouver sa place. C’est beaucoup de travail, pas seulement de création et de fabrication, mais aussi beaucoup de communication ! Il faut arriver à se démarquer. Globalement, il y a toujours quelqu’un qui aime ce que l’on fait, tout l’enjeu est de savoir à qui s’adresser et comment ! A l’ère des réseaux sociaux, on pense que c’est facile, mais il faut savoir communiquer et savoir se vendre.

Je pense qu’il y a une forte notion de temps dans la pratique artisanale qui peut paraître en contradiction ou décalée avec notre époque dans laquelle tout est dans l’instant et la nouveauté. Il y a une tendance (qui n’est pas qu’une mode) à revenir à certains modes de consommations plus « slow », qui est notre alliée. Mais il faut arriver à communiquer dessus. Je pense notamment à la mise en avant de la différence entre des bijoux « fabriqués » à la main (dans l’atelier, à partir de « rien », avec un savoir-faire) et d’autres « assemblés », dont je ne dénie pas la créativité ! Mais dont le mode de production n’est pas le même, et les gens ne font pas toujours la différence. C’est la raison pour laquelle je parlais de valeur, il faut connaître la valeur de son travail.

Photo : © Tony Trichanh

Qu’est-ce qui est le plus gratifiant dans votre métier ?

Voir un de ses bijoux portés, et par quelqu’un qui n’a aucun lien avec soi !
Voir les gens montrer de l’intérêt pour ses bijoux, dans les salons. J’ai toujours un doute sur ce que je fais, ça me motive.

Quels sont vos projets?

Développer une section « mariage » avec des bijoux spécifiques et d’autres qui peuvent s’y prêter. Je veux les montrer en situation dans des shootings photo. Depuis le début, j’ai aussi envie de créer une ligne parallèle, basée sur un principe de RDV : le bijou du mois, de la semaine, du trimestre, de la saison, etc, selon le rythme que j’arrive à tenir ! Un bijou unique ou en série très limitée serait présenté. À travers ce projet, je pourrais retrouver un peu de ma pratique de l’Ecole des Arts Décoratifs.

Quel créateur souhaiteriez-vous voir prochainement dans L’Envers du Décor ?

J’aurais bien cité Peter Hopper, mais c’est déjà fait !

Sinon, d’autres créatrices qui ont le même genre de démarche créatrice et artisanale : Monochromatiques, Virginie Fantino, Lou d’Adélaïde, Laura Parisot, Alix Loca… ou pourquoi pas Marion Delarue !