Après la présentation de la marque Harpo, Dorothée évoque le fonctionnement de cette entreprise familiale.

(c) Harpo

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Combien de magasins avez-vous?

Un seul, on en a eu plusieurs en France dans le passé, mais nous avons tout réuni en une seule boutique. On a des revendeurs un peu partout dans le monde.

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Comment définirais-tu la clientèle?

Elle est très vaste, je n’ai pas du tout de clientèle type. Ce qui est amusant dans ces bijoux, c’est qu’ils réunissent plein de personnes différentes. Il y a des gens de la mode, des gens qui aiment les indiens, d’autres qui aiment juste la turquoise, etc.

Il y en a vraiment pour toutes les bourses. Nos clients sont aussi bien des hommes que des femmes, c’est 50/50. Leurs bijoux peuvent être classiques comme plus ethniques. Certaines pièces, sorties du contexte, ne semblent pas d’origine amérindienne. Ils ont cette capacité à offrir une énorme variété dans leurs bijoux.

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Où vas-tu chercher ces pièces?

Dans tout le Sud Ouest américain, là où les tribus se croisent pour nous faire rêver…

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As-tu étudié la signification des symboles ? Quelles sont les grandes valeurs dans ces pièces ?

Oui, ces pièces représentent souvent les éléments de la nature. Généralement, l’eau, la terre, les éclairs, le ciel, etc. Ce sont des animistes, leur force est dans tout ce qui les entoure. La turquoise est pour eux un symbole de spiritualité, de richesse et de fertilité. La plus belle d’entre elles se nomme “The Sleeping Beauty”  selon les Navajos.

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À l’époque où les indiens étaient en guerre ou pendant leurs transhumances, ils avaient toujours de la turquoise sur eux pour les protéger. Ils en offraient aussi aux dieux pour certaines prières. Pour eux, cette pierre était déjà une pierre de prédilection dotée d’un grand pouvoir, qu’ils emmenaient, qu’ils valorisaient en bijoux avec tout un travail de l’argent. Un travail qui est un peu différent selon les tribus.

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Chez les Navajos, ils vont travailler la pièce par rapport à la forme de la pierre, comme la nature leur a donné, un peu brute. Chez les Zunis (moins connus), il s’agit davantage d’un travail de marqueterie, d’orfèvrerie comme certains bijoux que nous proposons également. Selon les tribus, il y a des significations qui se rejoignent ou des choses complètement différentes. En tout cas, c’est toujours ce rapport simple à la nature, à la matière et faire un bijou fort qui correspond à leur caractère.

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Où se fait l’approvisionnement?

Dans plein d’endroits différents, en fonction des artistes et de leur lieu de vie. Les indiens ont différents territoires, différents petits villages. Chaque village a sa spécialité. Certains ne font que des poteries ou un travail de bijoux spécifique à leur savoir faire.

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C’est un travail ancestral, certains éléments encore utilisés aujourd’hui ont été retrouvés dans des fouilles archéologiques. C’est l’arrivée des espagnols qui a fait évoluer le travail de l’argent, reprenant ainsi certains motifs déjà utilisés par ces derniers. Notamment la « Concho Belt » la ceinture conchas qui sont de grosses plaques d’argent qui font tout le tour de la taille. (Comme la fameuse ceinture de Jim Morrison). Ils l’ont décliné avec leurs propres poinçons qu’ils façonnent bien sûr eux mêmes. Elle est devenue une pièce maitresse dans leurs tenues.

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Ces ceintures étaient principalement portés par les hommes ainsi que les colliers « Squash Blossom » ou les Joclas, ces grands colliers de Turquoises brutes enfilées sur un fil de tendon. Ce n’est que bien plus tard que ces belles parures se sont déclinées pour les femmes. Ces pratiques se transmettent de génération en génération et évoluent. Certains artistes se piquent des idées, certaines pièces sont identifiables. On sait que c’est fait à tel endroit ou par un tel parce qu’il y a un travail spécifique.

Au fil du temps les pièces peuvent être de plus en plus raffinées car leurs outils ont évolué, il y a aussi parfois des mélanges de design. Si un Navajo va faire des bijoux chez les Zunis, par exemple, il y aura une petite influence de marqueterie.

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Communiquez-vous les noms de ces artistes?

Parfois mais pas tout le temps. Toutes les pièces ne sont pas signées. Il y a des bijoux un peu génériques, on va dire, des éléments qu’on peut retrouver assez facilement et il y a des artistes qui nécessitent d’être nommés parce que leur travail est reconnu. Beaucoup d’indiens sont cotés, ils font des concours, gagnent des prix, ils sont ensuite inscrits dans des livres de cote, etc. Ils sont recherchés par certains collectionneurs. C’est une autre gamme, c’est vraiment pour une clientèle de collectionneurs qui est à la recherche de ce genre de pièces et ces pièces ont une grande valeur.

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Aurais-tu quelques noms d’artistes?

Il y a la famille Begay, les Platero, les Yazzie etc… c’est difficile, il y en a beaucoup.

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Cippy CrazyHorse

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Ambruse Roarhorse

Utilises-tu des outils pour vérifier la qualité des ouvrages?

Non, pas du tout. Ce n’est pas comme les diamants qui nécessitent un apprentissage particulier. C’est vraiment à l’oeil, c’est une habitude, celle de voir les pierres encore et encore. Que la pierre soit blanche, verte ou bleue, je regarde sa lumière et ce qu’elle m’apporte.

© Dorothée Zuliani

© Dorothée Zuliani

Il y a beaucoup d’aspérités dans la turquoise, il y a des centaines de mines différentes qui apportent différentes choses. Certaines sont d’un bleu très lisse, très pâle et d’autres ont beaucoup de nervures. Personnellement, je préfère quand il y a plus d’histoire dans la pierre plutôt qu’un bleu uni.

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Comment se détermine la qualité d’une turquoise?

C’est sa densité qui détermine sa qualité. Plus elles sont profondes, plus elles sont denses. Après, il ne s’agit jamais de mines très profondes comme les mines de diamants ou de pierres fines.

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Ce sont souvent des mines à ciel ouvert, parfois les veines de turquoise sont à même le sol. Cependant, comme pour toutes les pierres, il y a des mines avec de très belles turquoises qui fonctionnent au carat comme certaines autres pierres, selon leur poids, etc.

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Comment les artisans s’approvisionnent-ils en pierres ?

Il y a des mines de turquoise qui n’appartiennent pas toujours aux indiens. Les artistes achètent les matières premières et choisissent ce qu’ils souhaitent ou bien nous choisissons directement les pierres pour réaliser des pièces particulières.

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Crédits photos : photographies fournies par Dorothée Zuliani et publiées avec son autorisation © Harpo sauf mentions suivantes : © Dorothée Zuliani